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UVRE DE JEAN D'IBELIN

■ que cette dame a perdu ses droits et a 6te privet de son

■ heritage de la seigneurie et de la forteresse d'Acova.

■ Main tenant, nous vous demandons si voua desirez que
«je vous fasse justice selon la loi, ou si vous reclames
« une faveur et une grace de moi , comme de votre prince ,
i en faisant valoir que c'etait a cause de moi quelle e" tait

• hors du pays, et n'avait pu se presenter dans, la prin-

• cipautd pour faire valoir son droit, au terme present

• par les usages. •

Nicolas de Saint-Omer fit au prince la reponse sui-
vante : « Seigneur, prince de Mor^e, je,vous prie de croire

• que si j'&ais convaincu que la dame Marguerite ne fut
< pas fondle, aaps ses relaxations du fo^t et de la ba-

■ ronnie d'Acova, je n'aurais pas d^daigne* de vous les
« demander comme une grace. Mais ici ses droits sont

• evidents, ainsi que vous le savez bien vous-merae.
« C'etait pour vous que ma scaur e" tait d^tenue , et elle ne
« pouvait sortir de Constantinople pour venir reclamer

• en Moree son heritage d'Acova. Je ne vous demande
« dpnc pas une flr^' f?*** i^ne justice ^ conform^ment a
« ce que la loi present. ■

Le prince lui dit alors : « Puisque vous n'avez pas be-

• soin d'une grace de ma part , et que yous n'invoquez

• que la justice de la cour, je vous declare en verite" que
«ce serait pour moi un p&shi devant Dieu et un juste
« sujet de blame aux yeux des hommes , si je, ne me con-
« formais pas a la demande que vous me faites de vous

■ rendre justice. Je veux done que la chose soit decidee

• d'une maniere r£guli£re, et que les usages du pays
isoient consulted aveo attention et discernement; mais
« pour ne tomber dans aucune erreur et eviter tout re-

• procbe, je veux convequer tous les bannerets, prelats

• et chevaliers de la principaute" de Moree, et leur sou-

• mettre cette affaire pour qu'ils prononcent un jugement

• avec k crainte de I)ieu et conformemenl aux usages

• que 1'empereur Robert (Pierre de Courtenay, dont la

• fille avait epouse Geoffroy de Ville-Hardoin II) nous a
< transmis lors de son arrangement avec son gendre. ■

Le prince fit alors ecrire des lettres a tous les banne-
rets, chevaliers etliges de Ja principaute, qui arriverent
ftGlarentza et se reunirept pour juger 1'affaire conform^-
ment aux usages. Le prince dit alors a Nicolas de Saint-
Omer : • Je d&ire savoir quel est 1'avocat qui doit de-

• fendre votre sceur et parler pour elle devant la cour. »
Nicolas de Saint-Omer repondit qu'il voulait l'6tre lui-
meme, ejt qu'il se chargeait de faire valoir pour elle
tout ce que la loi lui offrait de iavorable relativement a
1'affaire de la }>aronnie d'Acova. Le prince lui dit alors :
« Puisque vous vous charges des fonctions d'avocat dans
« 1'affaire de la dame Marguerite , moi , de mon cdte" , par

• amide* pour vous et pour vous tenir compagnie , je me

• declare 1'avocat charge de deTendre les droits de la
« cour. • D s'adressa alors au Jogotheie , messire Leonard,
originaire de laPouille , qui etait un homme sage et tres-
mstruit, ami intime du prince etson premier conseiller.
H lui remit la verge du commandemeot qu'il ten ail
entre ses mains, et que portent tous les princes et les
seigneurs, et lui dit: « Je vous con&re la puissance que
•je possede, afin que vous presidiez la cour et rendiez
•justice conformement a la loi avec 1'avis et 1'assistance
« de tous eeux qui siegent dans cette cour, de tenir autani

• aux droits de Ja dame Marguerite qu'a ©eux de la .cour.
••Ne vous laissez entrainer ni par la crainte ni par I'amj-

• tie. Je vous enjoins, sur votre ame, c]e pjrenjd/e garde £
« ne pas vous laisser induire en erreur ; car moi , par af-
•fecu'on pour messire Jean de Saint-Omer, et pour lui

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« tenir compagnie , je vais faire le role d'avocat , et soute-
• nir contre lui les droits de la cour. ■

Messire Nicolas commenca ensuite le premier a ex-
poser 1'affaire des son origine, e'est-a-dire en racontant
comment la seigneurie d'Acova etait echue a la proto-
stratoresse madame Marguerite, ainsi que nous l'avons
rapporte plus haut, enfin tous les motifs, tous les inci-
dents et toute la marche de 1'affaire.

Quand messire Nicolas eut termine son discours, le*
prince prit la parole a son tour et exposa tous ses motifs
et Routes ses raisons en opposition a ce que messire Ni-
colas avait avance , ainsi que cela est etabli par les regle-
inents suivis dans les tribunaux, et oe maniere a. ce que
chacun puisse dire ce qu'il croit utile a sa cause,. Apres
que chacun eut parle longtemps'et abondamment, le
prince fit apporter le Livre des Usages, et il expliqua en
detail ce qui y elait contenu ; comment, au cas ou le su-
zerain serait fait prisonnier par 1'ennemi et jet6 dans les
fers, son homme lige doit, si le suzerain le reclame, se
rendreen prison , comme otage en, sa place, pour phtemr
sa mise en liberte , et comment le suzerain doit ensuite ,
de son c6te, employer tous ses moyens pour faire sortir
de prisoq son bomme lige qui a pris sa place. (Voyez
les Assises de Romanie, c. m, p. 5oo, t. II de Canciani,
Barbarorum leges antiqua.)

Tous qeux qui siegeaient alors dans la cour emirent
1'avis, que puisque c'etait pour lui quelaprotostratoresse
avait ete mise en otage, elle 4tait fondee par cette cir-
constance particuliere a revendiquer son Rentage. Mais
le prince ouvrit de nouveau le livre de la loi , et deve-
loppa un chapitre ( c. cxvi ) par lequel il prouva , que se-
lon les termes del'assise, elle e^ait engaged par un devoir
indispensable a se constituer otage, et que, d'un autre
c6t6, il etait declare" formellement par I'assise, que puis-
qu'elle ne s'&ait pas trouvee en Moree dans les termes
voulus par 1'usage , elle n'avait plus aucun droit a recla-
mer son heritage.

Les juges changerent alors d'opinion , et reprenant la
parole ils declarerent , que puisque |a dame 6tait Jenue
d'entrer eri prison lorsque son seigneur lige le deman-
dait aux termes des assises, et quelle ne s'e*tait pas pr6-
sent£e , dans le delai voulu en Moree , au prince pour re-
clamer ses droits , elle avait perdu tous ses droits du jour
meme au ce delai etait expire 1 . Us declarerent done toutes
les reclamations de la dame mises au neant. Le prince et
messire Nicolas furent alors invite's a se presenter devant
la cour. Le logothete , qui ten ait la place du prince, prit
la parole et leur annonca que la cour du seigneur avait
gagn£ le fort d'Acova , ainsi que cela 6tait prouv^ d'une
maniere precise par le Livre des Usages, tel qu'il avait
4t£ redige 1 des le principe. Quand le prince eut entencju
cet awftt, il remercia la cour, ainsi que cela est usite" , et
prit conge; mais le protostrator, messire Jean de Saint-
Omer, ne voulut pas remercier la cour. Tons les grands
et les bannerets prirent conge du prince , et chacun se
retira comme il voulut, et ou Tappelaient ses affaires.

Le prince (jit ensuite au logoth&te avec un grand dis-
cernement : « Je vous jure devant le Seigneur, mon logo-

• thete, que le jugement qui vient q"etre rendu, et par
i lequel la dame Marguerite a £l£ d£sh£rit& de la sei-

• gneurie du fort et des d^pendances d'Acova , m'a fait
« d autant plus de peine , que je sais fort bien que e'est
« moj qui l ai envoyee en otage a Constantinople , et que
« p'esi la ce qui l a empechee de se presenter, dans le

• delai youiu , devant ma cour pour reclamer son he-
« ritage. Voici comment il m'est arrive" d'etre cause de

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